Merci à Sbb, Kraby, Frog, Mko et Jen pour leur participation.
Que l'on ait les qualités pour vendre, l'occasion ou l'envie ne change malheureusement rien.
J'ai mûrement réfléchit à la question avant de répondre à ce recruteur.
Ma réponse à été: je ne vends pas. Quand il m'a demandé, si je comprenais bien que, du coup, je ne serais pas embauché, j'ai répondu par l'affirmative. Puis, j'ai brodé sur les risques d'impayés, de contentieux etc... Pas envie de lui dire directement que je n'étais pas prête à n'importe quoi pour décrocher un boulot.
Pas prête à considérer les clients comme des dossiers surtout quand ma décision risquait d'avoir des conséquences négatives pour eux.
Ouhlà, dis comme ça cela fait un peu Mère Thérésa des Forces de ventes non?
En fait, je crois surtout qu'à l'époque, je pouvais m'offrir le luxe (ou tout du moins en avoir l'impression) de ne pas accepter le premier job venu.
Il s'agissait de mon premier entretien d'embauche de jeune diplômée. L'IUT nous avait tellement gonflé le ciboulot que nous étions tous persuadé que les entreprises nous dérouleraient le tapis rouge à la vue de notre joli diplôme.
J'ai rapidement déchanté mais je n'ai jamais regretté ma réponse.
Tout comme je ne regrette pas d'avoir fait mes armes dans un autre domaine depuis.
J'ai beaucoup de mal à considérer les gens comme des portefeuilles ambulants. Je ne dis pas ça de manière péjorative, en fait j'ai du mal à les considérer en terme de pouvoir d'achat.
A l'époque et même aujourd'hui j'ai le choix. Non que je me monte la tête en me prenant pour je ne sais pas qui ou en pensant que telle ou telle entreprise n'attends que moi pour enfin dégager des bénéfices (ouh la grosse tête).
J'ai encore le choix parce que je n'engage que moi. Je n'ai pas de famille à charge, pas de conjoint, pas d'obligation familiale (mes parents sont encore autonomes) et mes choix n'ont donc comme portée que les limites de ma vie quotidienne.
Par contre, je sais qu'il n'en sera pas toujours ainsi, c'est sans doute pourquoi je m'investis tellement dans mon boulot. Je souhaite pouvoir offrir à mes enfants un confort de vie que je n'ai pas connu. Et pour aller encore plus loin, je souhaite pouvoir un jour récompenser mes parents pour tous les sacrifices qu'ils ont fait pour moi.
Le chômage à 50 ans je connais. Ma mère s'est fait licencier à 2 jours de ses 50 ans (hasard?) après 3 années douloureuses de harcèlement. Elle a mis 3 ans à s'en remettre ma Lionne, à remonter la pente, à reprendre confiance en ses compétences, en ses connaissances, en elle tout simplement.
Je suis pas à pas sa recherche d'emploi, ses peurs, ses doutes, ses "échecs". Je découvre que le système n'est pas tendre avec ceux qui se sont sacrifiés pour lui.
Petite info au hasard. Savez-vous qu'au bout de 3 ans de chômage, l'on vous fait passer un test pour vérifier que vous êtes toujours apte à exercer le métier que vous connaissez par coeur depuis près de 30 ans?
Ma Mamouschka s'est ainsi retrouvé sur les bancs de l'école à faire une formation sur l'utilisation d'internet sanctionné par une attestation. Ca m'a fait mal au coeur de la voir stressé à s'en rendre malade pour cette attestation. L'avoir en ligne à 2h du matin à réviser ses cours sur Excel pour son examen de 8h.
J'aurais voulu lui dire que ce n'était pas grave si elle loupait (comme elle me le disait à la belle époque de mes examens) mais ç'aurait été mentir, et nous le savions aussi bien l'une que l'autre. Ne pas avoir cette attestation signifiait ne plus pouvoir postuler aux emplois correspondants à ses diplômes et à ses années d'expériences.
Se retrouver dans un cul de sac. Elle qui a occupé beaucoup de postes de secrétaire de direction se serait trouvé orienté vers des postes de standardiste, d'agent d'accueil ou de femme d'entretien.
Je ne considère aucun de ces postes comme dégradants mais qui accepterait facilement, après avoir driver plus de 15 personnes, de redémarrer au premier échelon? Sachant qu'à 54 ans, vous n'avez plus forcément l'énergie, l'envie ou le courage de vous investir dans une entreprise comme lorsque vous aviez 20 ans.
Surtout que, ne nous leurrons pas, les entreprises qui misent aujourd'hui sur les plus de 50 ans sont rares.
Effectuant moi-même certains recrutements pour mon service, j'entends déjà ce type de remarque: "trop vieux, tiendras pas la cadence", "trop mature, sera difficile à manager", "trop d'expériences, ne restera pas dans ce poste assez longtemps"...
"De toute façon il y en a 15 qui attendent à l'ANPE" (réflexion entendue hier), alors pourquoi s'encombrer avec quelqu'un qu'il faudra former ou pire adapter le poste?
Bien sûr que cela me fait bondir, c'est normal. Il s'agit de racisme ordinaire. A mettre dans la même catégorie que les trop gros, trop petit, trop handicapé (et pourtant il y a des aides), trop basané...
Bizarrement toujours trop ou pas assez, comme si l'entreprise était la panacée et que l'on ne puisse accepter que des gens d'exception dans nos rangs.
Combien de personnes aujourd'hui peuvent dire qu'elles s'épanouissent pleinement dans leur boulot? Ok ce n'est pas forcément le but. On a tous besoin de manger, d'avoir un toit sur la tête, d'élever sa famille mais est ce que cela suffit à nous rendre heureux tous?
Je me souviens d'une réflexion que je faisais, il y a quelques mois, à un ami, concernant des négociations nationales pour les grilles de salaires dans sa branche.
Il me demandait pourquoi il y a vais tellement d'opposition à accorder un salaire honnête par rapport au travail fourni? Pourquoi cela créait autant de résistance, alors que certaines entreprises dégagent tellement de bénéfices?
Ma réponse fut certainement une trahison à ce que l'on essaye de faire passer pour mon clan d'appartenance: l'encadrement. Cracher dans la soupe en un mot.
Ma théorie est que, finalement, en laissant les gens se focaliser (et je ne suis pas la dernière) sur le besoin d'une reconnaissance salariale on détourne l'attention. Demain vous gagnez correctement votre vie, votre travail est récompensé justement à hauteur de vos efforts et de sa valeur, que reste-t-il? Quelle carotte peut-on encore agiter pour vous donnez envie de vous surpasser?
Dur dur, il va falloir alors rendre votre travail intéressant, vous en aurez vite assez de la routine, vous réclamerez des formations, des possibilités d'évolutions, de meilleures conditions de travail.... Toutes ces éléments si difficiles à mettre en oeuvre! C'est qu'il faut se creuser le ciboulot pour rendre ses employés heureux, alors qu'un petit chèque de temps en temps c'est tellement plus simple!
Alors oui, je comprends que face à de telles exigences, face à ces regards critiques, qui vous soupèsent, qui évaluent si (comme pour les jeux d'enfants) le petit cube risque de ne pas passer dans l'emplacement carré, si vous intégrerez facilement l'équipe en place, on puisse avoir les mains qui tremblent, le sourire hésitant et la combativité dans les chaussettes.
Bien sûr que je ne prône pas l'embauche à tout crin, on ne fera jamais d'un haltérophile une danseuse de balai (quoique avec ces nouveaux aspirateurs! lol!). Mais lorsque l'on parle de respect envers les anciens, pourquoi renier leur expérience, pourquoi craindre la transmission du savoir?
L'intelligence du coeur n'a pas d'âge mais parfois l'on se dit que certains n'ont jamais grandit. La faute au système vraiment?
Pas grand chose à ajouter.
Pourtant, même si je suis d'un natuel optimiste, j'avoue que sur certains points comme celui-ci, j'ai peu d'espoir...
Rédigé par : Hélianne | 30 septembre 2005 à 19:33
Très belle note, sur le fond et sur la forme. à consever
Rédigé par : razafindratsira | 30 septembre 2005 à 11:59
T'as raison et c'est bien dommage.
C'est pas faux non plus ton histoire de carottes.
C'est quand même bête que le seul endroit où l'on ne se lasse pas des vieux ce soit.... la politique.
Rédigé par : Sbb | 30 septembre 2005 à 00:13
Sans voix à la lecture de cette note si forte, puissante et véridique...se poser la question de savoir si chacun ne porte pas un peu de responsabilité dans la dérive de notre société toute entière vers le reniement de plus en plus prononcé des qualités et compétences de nos "anciens"...
Rédigé par : ombre | 28 septembre 2005 à 22:30